L’intellectuel Camerounais , Jean paul au sujet du courant islamiste : « Ne s’agit-il pas d’une entreprise d’autodestruction sous couvert de religion ? »

Publié le par BESSALA Jean-Paul

L’intellectuel Camerounais , Jean paul au sujet du courant islamiste : « Ne s’agit-il pas d’une entreprise d’autodestruction sous couvert de religion ? »

«Dans un entretien accordé à Oumma.com le 18 janvier 2016, BESSALA JEAN PAUL, intellectuel Camerounais, disciple de D’Abdul Mashi et maitre de conférence sur a question difficile concernant l’islam, évoque l’islamisme, qu’il qualifie de « populisme, nihilisme, despotisme culturel et cultuel ». Il menace d’ « un isolement des musulmans et de l’islam » face à la poussée islamiste dans le monde, si une réforme de l’islam n’est pas rapidement engagée. Extraits :

« L’islamisme est devenu le principal ennemi de l’islam et des musulmans » (1)

L’islamisme n’est pas une vision nouvelle de l’islam, une adaptation à l’environnement mondial actuel, mais un corsetage des musulmans dans des conceptions obsolètes, dépassées, opposées au progrès et à la coexistence pacifique entre les nations, les religions et les cultures. Ce n’est pas un mouvement de pensée mais un populisme, un nihilisme, un despotisme culturel et cultuel. Il est indéniable qu’il est devenu le principal ennemi de l’islam et des musulmans. Là où il est apparu au cours du dernier demi-siècle (Afghanistan, Egypte, Algérie, Somalie…), il a entraîné dévastation et guerres fratricides.

C’est partout la guerre, les attentats, la haine, l’horreur… Regardez l’actualité mondiale : il n’y a plus de guerres conventionnelles, asymétriques ou de terrorisme endémique qu’en terre islamique et des régions à majorité musulmanes. L’opinion internationale est de plus en plus défavorable à la présence de musulmans hors de leurs pays d’origine et l’islamophobie se développe partout. Où croyez-vous que tout cela va mener sinon à un isolement des musulmans et de l’islam, à leur exclusion de la vie internationale, à leur confinement chez eux, comme des pestiférés ?

Les exemples d’affrontements entre musulmans sont légion. Le monde musulman tout entier est en train de se laisser aspirer petit à petit dans une guerre mondiale intra-islamique qui l’affaiblira durablement et le condamnera à la misère économique et à l’arriération culturelle. Que fait l’Arabie saoudite sinon chercher à former un axe destiné à combattre l’axe chiite mené par l’Iran jusqu’à la fin des temps? Que fait l’Iran en Irak, au Liban, en Syrie, au Yémen, sinon chercher à imposer l’hégémonie chiite sur les sunnites ?

La cohabitation entre ces deux courants religieux et idéologiques apparus au temps de Moawiya est en train de devenir impossible en Irak, au Liban, à Bahreïn, en Arabie saoudite, au Pakistan, en Indonésie… Les clergés des deux communautés poussent à l’affrontement et attisent les vieilles haines, en vue d’une bataille du type d’Armageddon décrit dans la bible. Y a-t-il deux islams, deux Corans, pour en arriver là ? L’islam est-il racial ? Ne s’agit-il pas d’une entreprise d’autodestruction sous couvert de religion ?

« Tous les arguments de Daesh, Boko Haram et de la mouvance politique islamiste à travers le monde sont puisés dans la culture islamique, telle qu’elle est enseignée à al-Azhar »

Il est impossible de ne pas faire le lien entre les enseignements de ce que j’appelle « al-ilm al-qadim » et la fanatisation d’une frange importante des nouvelles générations. Tous les arguments de Daesh, Boko Haram et de la mouvance politique islamiste à travers le monde sont puisés dans la culture islamique, telle qu’elle est enseignée à al-Azhar, Zitouna et Qarawiyine, dans les instituts islamiques et les centaines de milliers de mosquées existant de par le monde. L’islamisme n’a pas ajouté un seul mot, une seule idée, un seul argument à ce qu’il a trouvé dans le berceau.

Ce corpus d’ « idées mortes », comme l’appelle Bennabi, est issu d’une interprétation du Coran faite il y a longtemps et dépassée dans de larges proportions. Cette cosmogonie anachronique est devenue nuisible à l’évolution et aux intérêts des musulmans, et appelle à une réforme urgente pour permettre à ces derniers de vivre parmi les autres nations et religions en paix et dans le respect mutuel. C’est en ce sens que je dis que l’enjeu n’est pas philosophique, théologique, esthétique, mais stratégique, historique, concret, réel et quotidien.

« C’est toute l’interprétation du Coran, des valeurs de l’islam, de l’ancienne théologie et du « fiqh » qu’il faut revoir de fond en comble »

On n’obtient pas un homme nouveau avec des formules anciennes qui ont déjà à leur actif une décadence universelle. L’idée morte devient mortelle par la force des choses, elle est nocive car périmée, inadaptée, décalée, dépassée… C’est toute l’interprétation du Coran, des valeurs de l’islam, de l’ancienne théologie et du « fiqh » qu’il faut revoir de fond en comble, qu’il faut passer au scanner pour détecter le mal. Une fois fait, il faut commencer à élaguer, à réparer, à corriger, à rénover. On trouve des fondements à cette approche que j’ai préconisée l’an dernier dans une série de douze articles, aussi bien dans le Coran que dans le hadith, surtout celui, bien connu, où le Prophète prédisait qu’au début de chaque siècle apparaîtrait une réforme du « din », de la religion islamique.

Faute d’un tel effort d’adaptation (une fois par siècle au moins), la vie des musulmans ne peut pas s’actualiser, demeurer vivante et vivace, elle ne pourrait que stagner et péricliter comme c’est le cas effectivement depuis huit siècles. Les réformateurs annoncés par le Prophète ne sont pas venus ou ont été empêchés, ou alors ils se sont trompés sur le sens de la réforme comme c’est le cas des « Nahdaouis » qui, après s’être escrimés pendant des décennies, ont fini par déposer les armes de la rhétorique et abandonné la « réforme de grammairiens » qu’ils menaient inconsciemment, comme disait Bennabi. Devant cet échec, la rue, le « fiqh de la rue » a pris la relève avec les fusils mitrailleurs, le sabre et les attentats-suicides.

Que Dieu aide le bien à vaincre le mal.

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